INAUGURATION DES RÉTROSPECTIVES DES ARTS PLASTIQUES EN TUNISIE.
Présentation
« 150 ans d’arts plastiques »
Organisée par le Musée national d’art moderne et contemporain sous l’égide du ministère des Affaires culturelles, l’exposition « 150 ans d’arts plastiques » est une rétrospective des différents courants, mouvements, écoles et périodes notoires de l’histoire récente des arts plastiques en Tunisie, de la moitié du 19ème siècle jusqu’à nos jours. L’exposition se divise en quatre périodes historiques, à savoir la période beylicale, la période coloniale, la période abstraite et enfin la période de l’extrême contemporain.
L’exposition, qui comprend une sélection d’environ 400 œuvres appartenant au Fonds national d’arts plastiques, se fixe comme objectif premier de mettre en valeur et de promouvoir la richesse du patrimoine national d’arts plastiques, en documentant ses principales étapes en Tunisie à travers les années et les décennies. Des œuvres emblématiques de chaque période historique ont été finement sélectionnées afin de reconstruire un panorama rétrospectif, permettant de retracer et faire découvrir un siècle et demi d’histoire d’arts plastiques en Tunisie.
De la peinture à la sculpture en passant par la tapisserie, la céramique, la gravure et la photographie, l’exposition « 150 d’art plastique » propose un parcours muséal, échelonné sur plusieurs étapes, pour une historiographie qui se veut la plus exhaustive possible d’un siècle et demi d’art plastique en Tunisie. De l’époque beylicale à celle coloniale, de la période postcoloniale à celle contemporaine, « 150 ans d’art plastique » fait découvrir les œuvres les plus représentatives des différentes mouvances, tendances et expressions artistiques en Tunisie.
Des premières œuvres des pionniers jusqu’à la période de l’extrême contemporain, en passant par l’emblématique Ecole de Tunis et l’époque dite « abstraite », outre la « parenthèse » d’art naïf et la phase d’essor de la tapisserie, l’exposition « 150 ans d’arts plastiques » reflète la diversité des courants artistiques et des écoles de création et met en valeur la créativité des différentes générations d’artistes tunisiens et étrangers résidents en Tunisie.
Déployé sur deux salles, en trois étages, le parcours muséal permet de reconstituer et faire découvrir, à travers une approche chronologique, les différentes étapes importantes de l’histoire des arts plastiques en Tunisie. L’exposition s’inscrit dans le cadre d’une stratégie nationale visant à préserver la mémoire matérielle et immatérielle nationale de toutes les formes de dégradation et de valoriser la richesse du Fonds national d’arts plastiques.
Ministre de la Culture Dr. Hayet Ktat
Que nous inaugurions aujourd’hui cet important monument culturel qu’est le MUSEE NATIONAL D’ART MODERNE ET CONTEMPORAIN signifie que nous franchissons une nouvelle étape dans la valorisation du patrimoine matériel et immatériel de la Tunisie.
La Tunisie a longtemps et impatiemment attendu la création de cette somptueuse institution. Les artistes l’ont beaucoup attendue, mais aussi les critiques et les amateurs d’art, car un musée des arts constitue en soi une étape importante sur le chemin de la création artistique. C’est une institution nécessaire dans le processus créatif et dans la vie culturelle des peuples.
Le musée, qui est à la fois un espace pour exposer et un sanctuaire pour la mémoire, un lieu pour la production scientifique et pour le rayonnement artistique, est une institution culturelle et intellectuelle aux multiples fonctions : fonctions de conservation et d’exposition, de cotation et d’expertise, de classement et d’évaluation de l’œuvre d’art et de la production scientifique. Il a également pour rôlede découvrir et de faire connaître les travaux de création,les anciens et les nouveaux, et de stimuler les jeunes artistes. Pour ce faire, il est appelé à publier les catalogues et les livres et à faire émerger les talents.
Le musée a par ailleurs une fonction hautement morale, compte tenu des services inestimables qu’il est appelé à prodiguer au profit de l’art et des artistes, une fonction de nature anthropologique et une aptitude à entrevoir les perspectives capables de mener la création vers les hautes et multiples sphères intellectuelles et cognitives.
Le musée est appelé à fournir d’éminents services aux arts plastiques, en ce sens qu’il est là pour compléter le travail et les efforts de l’artiste. C’est au sein du musée que le cycle est couronné, un cycle de rapports où l’art constitue le pivot autour duquel gravite la création artistique de l’humanité.
Car l’art n’est pas un produit que l’artiste exécute et qu’il livre à la société, il n’est pas une marchandise mise en circulation parmi les hommes. L’œuvre d’art est un document historique et émotionnel de l’humanité. Elle porte un témoignage de la culture des peuples, offre un reflet de leurs sensibilités à travers tout un réseau de traditions et de coutumes, de techniques, d’images et de représentations relatives aux vicissitudes de la vie.
C’est pour cela que dans l’art, il y a ce qui doit être conservé, ce qui doit être exposé et ce qui est appelé à circuler entre les mains des hommes : un patrimoine culturel transmissible, hautement symbolique et aux dimensions plurielles passibles des interprétations les plus diverses. Et c’est au musée qu’incombe la tâche de déterminer ce qui est à répertorier, à conserver, à archiver ou de redistribuer l’ensemble de la production artistique symbolique, toutes techniques, toutes formes et toutes datations confondues.
Le musée est le garant de la pérennité des œuvres d’art dans la mémoire collective et nationale. C’est à lui qu’il revient d’attribuer à l’œuvre la valeur qui lui est due à travers le travail des experts, des historiens et des critiques d’art, mais aussi en la soumettant au regard du public, en la présentant et en l’interprétant.
Mais le musée ne doit pas se borner à exposer et à conserver. Il est appelé à produire des textes scientifiques, à présenter la documentation utile, à proposer et organiser des symposiums, à faire appel aux spécialistes, bref à faire de la place des arts un atelier perpétuel complètement ouvert. C’est en ce sens que s’il est nécessaire, c’est en raison de la nécessité inhérente à ses fonctions, qu’il s’agisse de nos concitoyens ou de ceux qui viennent découvrir notre pays.
Aujourd’hui, nous inaugurons donc cette exposition qui comprend des travaux puisés dans le fonds artistique national. Nous espérons qu’elle vous mènera dans une sorte de voyage à travers l’immense réserve artistique constituée par les acquisitions nationales : des œuvres d’artistes tunisiens et d’autres, exécutées par des précurseurs, orientalistes et colons, ceux qui ont implanté les arts plastiques en Tunisie, aplani le chemin pour leurs successeurs et subi les désagréments que rencontrent toujours les pères fondateurs.
Aux œuvres de ceux-là, s’ajoute un choix de tout ce que nos créateurs tunisiens ont produit de mieux au cours du siècle dernier et au début du vingtième siècle. C’est là une œuvre qui témoigne de la créativité de nos artistes et qui administre la preuve de leur aptitude d’adaptation aux mutations dans les arts plastiques pendant des décennies.
Maintenant que nous nous apprêtons à inaugurer cette exposition, un sentiment de fierté nous remplit, une fierté due aux efforts consentis afin que cette œuvre voie le jour, témoigne en faveur des générations passées et constitue un pas de plus dans la construction d’un présent nouveau où se conjuguent les efforts pour un avenir meilleur.
La Tunisie le vaut bien, et les arts y méritent encore plus. Réjouissons-nous donc de ce pas de géant et faisons la promesse de persévérer dans cette voie pour une culture nationale épanouie et achevée.
Commissaire d’exposition Mohamed Hachicha
Et voilà l’exposition …
Le dessin artistique est apparu en Tunisie depuis plus d’un siècle et cette exposition a pour objectif de présenter les différentes étapes de ce type de production esthétique. C’est une tentative pour mieux faire connaître les productions les plus remarquables que possède le fonds national.
C’est la plus grande exposition organisée en Tunisie puisqu’elle rassemble l’art pictural et d’autres arts tels que la sculpture, la céramique, le tissage, la photographie et la gravure, ainsi que diverses autres expressions de l’art moderne. Tous sont représentatifs du niveau créatif que notre pays a atteint durant des périodes historiques successives. Pour cela, bon nombre de ces productions artistiques que nous exposons peuvent avoir des styles ressemblants ou des visions proches parce que leurs créateurs appartiennent à la même époque, leurs opinions se croisent et leurs conceptions convergent même si leurs modes d’expressions sont nécessairement différents.
Pour cette immense exposition, nous avons opté pour une division des travaux sélectionnés selon les générations, à savoir les fondateurs, les pionniers et leurs successeurs, selon les écoles et selon les différents groupes artistiques. Elle englobe tous ceux qui, jusqu’aux créateurs d’aujourd’hui, se sont distingués et dont les travaux constituent un réel ajout au paysage pictural tunisien, voire arabe pour ne pas dire mondial. Pour cela, nous avons privilégié la qualité, l’excellence et la représentativité des générations et des étapes pour donner un large aperçu de la créativité esthétique en Tunisie.
La richesse du fonds dont nous disposons nous permet d’exposer un grand nombre de productions qui ont été, pendant des années, abandonnées et enterrées sous la poussière, pire même, abîmées par l’humidité et les moisissures. Ainsi, plusieurs chefs d’œuvre dont les traits ont été effacés et érodés ont été malheureusement mis de côté, en attendant que le Musée National de l’Art Moderne et Contemporain puisse sauver ceux qui peuvent encore l’être.
Cette exposition a pour objectif de montrer la richesse du fonds national et de raviver le souvenir des artistes qui ont enrichi la scène picturale depuis la deuxième moitié du 19e siècle. Elle a aussi pour but de développer l’intérêt du citoyen tunisien pour les arts plastiques et enraciner en lui le goût artistique en attirant son attention sur les nouveaux bâtisseurs de sa civilisation et les artistes qui œuvrent à la pérennisation de ses us et coutumes ainsi que ceux qui ont œuvré pour que la Tunisie se démarque et soit unique au présent comme au futur.
Nous souhaitons que cette exposition soit une opportunité pour la recherche et le dialogue, non seulement pour les chercheurs spécialistes, mais également pour ceux qui sont captivés par cet art naissant en Tunisie et qui s’est transformé en un pan de l’activité esthétique et de la vision culturelle déterminant la nature de la culture nationale.
Le ministère des affaires culturelles a œuvré, depuis sa création, à la mise en valeur des arts picturaux qui ont toujours été nos meilleurs ambassadeurs dans les expositions internationales et cette action a permis de rassembler ce fonds dont nous pouvons être fiers. Ceci nous incite à le protéger, non pas en l’exposant périodiquement car cela lui nuirait plus que cela ne le servirait, mais en l’exposant en permanence pour que le large public en profite, en plus des spécialistes, chercheurs et étudiants, car il est insensé de garder des perles cachées et ignorées et quelle valeur peut avoir un fonds sommeillant sur les étagères!
Pour cela, notre espoir est grand quant à la mise en place des activités du Musée National d’Art Moderne et Contemporain qui devient plus urgente que jamais.
LA FONDATION DE LA PEINTURE MODERNE
DOCTEUR FETAH BEN AMEUR
La naissance et l’installation des arts picturaux en Tunisie peuvent être considérées comme un événement moderne capital. Leur pérennité ainsi que leur développement après l’indépendance – avec la mise en place du projet culturel national – sont, à notre avis, plus importants que leur lancement et leur acclimatation, et ce, en dépit de tous les efforts fournis par la France et des investissements qu’elle y a consacrés.
La courte histoire de la peinture en Tunisie est peuplée de nombreuses expériences, de questionnements, de compositions et recompositions diverses du patrimoine. Si elle n’a pas produit d’écoles ou de styles au sens de courants formels suffisamment prégnants pour s’élargir à des expressions culturelles, elle n’en a pas moins été riche en approches nouvelles.
La scène artistique connaît, aujourd’hui, en Tunisie, une réelle mutation. Depuis deux décennies, on voit émerger des productions qui rompent avec les modes habituels de peindre et d’exposer. Ces créations dévoilent une dynamique sensible par le nombre d’expositions, de manifestations en espace public et par leur médiatisation, jusque là inédite à l’échelle locale. […]
La courte histoire de la peinture en Tunisie est peuplée de nombreuses expériences, de questionnements, de compositions et recompositions diverses du patrimoine. Si elle n’a pas produit d’écoles ou de styles au sens de courants formels suffisamment prégnants